ESTONIE (RÉPUBLIQUE D’)

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ESTONIE RÉPUBLIQUE D’

En 1995, quatre ans après la restauration de son indépendance, l’Estonie donne des signes de progression vers la stabilité. Mais elle est aussi marquée par des incertitudes. La première législature (oct. 1992-mars 1995), menée par une majorité de droite, aura été aussi constructive (élections du Parlement d’avant guerre, le Riigikogu, 101 membres, et mise en place d’un système parlementaire après l’adoption de la Constitution par référendum le 28 juin 1992, politique de réforme ultralibérale menant le pays à grands pas vers l’économie de marché) que tourmentée (dissensions au sein de la coalition au pouvoir Pro Patria — E.R.S.P. ou Parti estonien pour l’indépendance nationale — modérés, Parlement nationaliste en inadéquation avec les revendications de la communauté russophone...). Lors des deuxièmes élections législatives depuis l’indépendance, le 5 mars 1995, Tiit Vähi, leader du Parti de coalition, Premier ministre de janvier à octobre 1992, l’a emporté grâce à son alliance avec Arnold Rüütel (Parti du peuple rural), président du Soviet suprême d’Estonie de 1983 à 1992. Il a formé un gouvernement de coalition (centre) avec le Parti du centre d’Edgar Savisaar, Premier ministre d’avril 1990 à janvier 1992. Des signes de normalisation de la vie politique sont apparus par rapport à ce qui s’était passé lors des élections de 1990 et 1992. Les partis politiques se sont restructurés autour des grandes tendances aux dépens des petits partis, trop nombreux, et notamment des partis ultranationalistes qui n’ont pas obtenu suffisamment de voix pour être représentés: les Estoniens n’ont pas voté pour soutenir le principe de l’indépendance, acquise à leurs yeux. Ils n’ont pas non plus été influencés par l’offensive russe en Tchétchénie qui aurait pu les conduire à soutenir les partis antirusses. De plus, les russophones de citoyenneté estonienne qui s’étaient déjà organisés politiquement à l’occasion des élections locales du 17 octobre 1993 ont obtenu pour la première fois six sièges au Parlement. Il faut cependant noter que seulement un tiers du vote russophone s’est porté sur la coalition russe, le reste allant aux autres partis, notamment le Parti du centre d’Edgar Savisaar, vainqueur dans la région d’Ida-Virumaa, dans le nord-est, peuplée à 76,5 p. 100 de Russophones. Malgré tout, à l’été de 1995, l’Estonie ne s’était pas encore délivrée de toutes les séquelles de son occupation. Sur une population russophone estimée (au début de 1994) à 520 000 personnes (34,5 p. 100 de la population totale), environ 120 000 ont la citoyenneté estonienne, 71 000 ont la citoyenneté russe et près de 325 000 n’ont aucune citoyenneté. Aux termes de la loi adoptée dans sa version définitive le 8 juillet 1993 ces deux derniers groupes étaient qualifiés d’étrangers, et devaient échanger leur propiska soviétique permanente contre un permis de séjour temporaire estonien. Alors que leurs possibilités de voyage à l’étranger et de regroupement familial risquaient de ce fait d’être réduites, les russophones attendaient beaucoup du nouveau gouvernement malgré les pressions de l’opposition et bien que Edgar Savisaar, ministre de l’Intérieur, ait donné la priorité à la lutte contre la criminalité. La plupart des résidents russophones déclaraient vouloir continuer à vivre en Estonie et ne pas se reconnaître dans l’Etat russe, voire ne rien attendre de lui. Leur statut a fait l’objet d’une observation rigoureuse de la Conférence sur la coopération et la sécurité en Europe et du Conseil de l’Europe au sein duquel l’Estonie a été admise le 13 mai 1993. Il a aussi été l’une des raisons des pressions de la Russie. Cette dernière, qui a finalement accepté de retirer ses troupes d’Estonie le 31 août 1994 (officiellement 2 400 hommes étaient encore sur le territoire estonien à cette date), n’avait toujours pas obtenu la ratification par l’Estonie de l’accord signé le 26 juillet 1994 et définissant les conditions de résidence des retraités militaires de l’armée russe.

L’Estonie a manifestement réussi son passage à l’économie de marché. Grâce à la politique ultralibérale menée par le gouvernement de Mart Laar (oct. 1992-nov. 1995), la couronne estonienne mise en circulation le 20 juin 1992 a jusqu’ici maintenu sa parité bien qu’elle soit indexée sur la monnaie européenne la plus forte (8 couronnes estoniennes = 1 deutsche Mark). Le pays est faiblement endetté et a adopté une politique budgétaire stricte. Les barrières tarifaires sont quasi inexistantes et la législation vise à attirer les investisseurs étrangers. Ce sont autant d’éléments qui ont valu à l’Estonie les félicitations du F.M.I. et de la Banque mondiale. Mais le taux d’inflation contenu à 35 p. 100 en 1993 s’est élevé à 48 p. 100 en 1994. Les privatisations effectuées à bon rythme se sont toutefois déroulées dans un mauvais climat du fait de la corruption et de la politique de restitution des biens confisqués par le pouvoir soviétique engagée parallèlement. La production estonienne a beaucoup chuté après la rupture des circuits commerciaux de l’U.R.S.S. En 1992 et 1993, cette baisse était respectivement de 38,7 p. 100 et de 27 p. 100. La tendance s’est inversée avec une augmentation de 6 p. 100 en 1994, mais elle s’accompagnait d’un taux de chômage réel dont l’estimation variait de 6 à 8 p. 100. L’agriculture estonienne a été totalement délaissée par le gouvernement de Mart Laar qui refusait d’accorder des subventions aux agriculteurs et de mettre en place des barrières tarifaires. Dès sa formation, le gouvernement de Tiit Vähi s’est engagé à améliorer les conditions de vie en milieu rural (crédits avantageux aux agriculteurs, décentralisation des pouvoirs). La balance commerciale déficitaire dénotait en effet le coup porté en 1993 et en 1994 à la production nationale du fait des importations massives de produits étrangers. Parmi ses principaux partenaires, l’Estonie comptait pour ses importations la Finlande (30 p. 100), la Russie (16,7 p. 100), l’Allemagne (9,9 p. 100) et la Suède (9 p. 100) - la France arrivant au treizième rang (1,9 p. 100) et pour ses exportations — la Russie (23 p. 100), la Finlande (18 p. 100), la Suède (11 p. 100), la Lettonie (8 p. 100) et l’Allemagne (7 p. 100) — la France se situant au neuvième rang avec 0,4 p. 100. Les relations de l’Estonie avec la Suède et la Finlande l’ont de fait rapprochée de l’Union européenne (70 p. 100 de son commerce extérieur) au moment de l’élargissement de celle-ci à quinze membres. L’accord de libre-échange a été signé avec elle le 18 juillet 1994 et est entré en vigueur le 1er janvier 1995 pour être ensuite intégré dans l’accord d’association signé le 12 juin 1995. Depuis 1991, l’une des priorités de l’Estonie a été de redéfinir sa place sur la Baltique et plus généralement sur l’échiquier européen au moment du remodelage de son environnement régional. La recherche estonienne de garanties de sécurité s’est conjuguée avec le souci occidental de stabilité. L’Estonie est partenaire associé de l’Union de l’Europe occidentale depuis le 9 mai 1994 et elle participe au programme de Partenariat pour la paix proposé par l’O.T.A.N. La Russie quant à elle s’oppose catégoriquement à l’intégration des pays Baltes dans l’Organisation du traité de l’Atlantique nord.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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